Article de fond

Comment le changement climatique bouleverse les saisons


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Le changement climatique transforme le paysage du risque pour les gouvernements et entreprises du monde entier. Il est probable que les événements météorologiques extrêmes deviennent plus fréquents à mesure que la planète se réchauffe, comme le souligne le récent rapport sur le changement climatique publié par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) des Nations Unies (en anglais). Jessica Tierney, co-autrice de l’un des chapitres de ce rapport et paléoclimatologue à l’University of Arizona, ajoute : « Ce type d’événements, qu’il s’agisse d’une vague de chaleur, d’un épisode de sécheresse ou de fortes précipitations, est véritablement une conséquence du changement climatique et la science dispose des éléments pour le prouver. Une inondation ou une sécheresse extrêmes peuvent théoriquement relever du hasard, mais nous pouvons maintenant montrer que la probabilité d’occurrence de ces événements est quasiment nulle sans le changement climatique. »

L’Europe n’est pas à l’abri de ces phénomènes, comme en témoignent les violentes tempêtes et les inondations majeures qui ont frappé plusieurs pays cet été. Le récent rapport d’Aon sur les catastrophes naturelles (en anglais) atteste l’impact de ces événements météorologiques extrêmes, avec jusqu’à 4,5 milliards de dollars de pertes déclarées aux assureurs au terme des tempêtes les plus destructrices jamais enregistrées en Europe.

Dans les années à venir, ce type d’événements aura très probablement des répercussions de plus en plus importantes pour les particuliers et les entreprises. Selon des données publiées par Météo France en février 2021, la hausse moyenne des températures dans notre pays serait proche de 4 degrés d’ici la fin du siècle, ce qui accentuerait leur fréquence et leur intensité.

Dans ce contexte, il ne fait plus aucun doute que les entreprises doivent investir dès aujourd’hui dans la réduction des risques d’inondation et de tempête pour éviter de futurs dommages matériels et interruptions d’activité

Risque d’inondation et météo orageuse

L’un des points clés pour renforcer sa résilience face au changement climatique est de comprendre le risque. Qu’est-ce qui cause cette intensification du risque inondation, même en été ?

Dans le cas de la France, le changement climatique provoque déjà des conditions météorologiques extrêmes. 2020, l’année la plus chaude depuis le début du 20e siècle, a aussi été marquée par une succession de tempêtes de la fin du mois de janvier au début du mois de mars et par trois épisodes caniculaires à la fin juillet, à la mi-août et à la mi-septembre. Sans oublier une sécheresse des sols exceptionnelle sur un large quart nord-est du pays du mois d’avril au mois de septembre1.

L’augmentation des précipitations a naturellement un impact sur le risque inondation qui pèse sur entreprises et particuliers, notamment lorsque de fortes intempéries sont concentrées sur une courte période. Un phénomène observé par exemple dans le sud de l’Aquitaine en décembre 2020, lorsque des précipitations et des inondations majeures ont provoqué des dommages considérables pour de nombreuses sociétés implantées dans la région. 

Autre facteur d’aggravation du risque inondation: l’urbanisation. L’artificialisation des sols liée à la croissance de la population urbaine réduit leur capacité d’absorption des précipitations. En cas de fortes intempéries, les phénomènes de ruissellement et d’inondation sont donc amplifiés. Par ailleurs, plus un territoire est urbanisé, plus il abrite de biens et d’activités créatrices de valeur. C’est pourquoi il est crucial pour les entreprises et les gouvernements d’anticiper les dommages matériels et pertes d’exploitation qui pourraient résulter d’un événement météorologique extrême. L’indice de résilience FM est un excellent point de départ, dans la mesure où il évalue la résilience du tissu économique de 130 pays face à des événements perturbateurs.

Outre le taux d’urbanisation, l’indice de résilience fournit des informations sur plusieurs autres composantes de la résilience climatique : le critère Exposition aux risques naturels mesure l’exposition d’un pays à au moins un risque naturel, par exemple l’inondation, tandis que le critère Qualité du risque catastrophes naturelles donne une indication sur l’efficacité des mesures mises en œuvre par les 130 pays étudiés pour réduire leur exposition à ce type de risques. Enfin, le critère Qualité des infrastructures offre un éclairage important sur la capacité d’un pays à faire face à des conditions météorologiques extrêmes.

Une menace pour les entreprises

S’il semble aller de soi que les phénomènes météorologiques extrêmes représentent une menace pour les entreprises, quelques données chiffrées permettent d’en prendre toute la mesure.

Selon les statistiques de sinistres de FM sur la période 2016-2020, les dommages causés par une inondation s’élèvent en moyenne à 826 000 USD et les pertes liées au vent ou à la grêle atteignent 931 000 USD par événement en moyenne. Bien que considérables, ces montants ne tiennent pas compte d’autres répercussions à plus long terme en termes de réputation, de parts de marché ou de confiance des investisseurs, pour n’en citer que quelques-unes. Ces derniers éléments étant toutefois marginalement assurables, on comprendra aisément pourquoi une stratégie de réduction des risques est absolument indispensable.

Optimiser la réduction des risques

Les mesures de réduction des risques s’inscrivent dans deux grandes catégories : sur le long terme, les dispositifs de protection ou réaménagements permanents et, à plus court terme, les plans de gestion de crise et de continuité des activités.

La première catégorie peut inclure divers investissements et actions, en fonction du type de risques auxquels un site est exposé. Pour optimiser leur pertinence et assurer leur efficacité, les ressources engagées doivent correspondre à la criticité du bâtiment ou du site et au niveau de risque acceptable pour l’entreprise. 

Plusieurs mesures permanentes peuvent être mises en œuvre pour limiter les dommages causés par une tempête ou une inondation, notamment les suivantes :

  • Installation de barrières anti-inondation permanentes pour empêcher l’eau de pénétrer dans des zones essentielles à la production. Dans l’idéal, l’emplacement de ces dispositifs devrait être défini à l’aide d’une carte des zones inondables à jour, comme la carte mondiale des risques d’inondation de FM. Cet outil en ligne interactif, qui s’appuie sur des données relatives aux précipitations, aux inondations et à la topographie des sols ainsi que sur une expérience de terrain, permet d’identifier l’impact de l’urbanisation sur le degré d’exposition d’un site donné.
  • Déplacement permanent des équipements et produits de grande valeur situés en point bas.
  • Renforcement de l’enveloppe extérieure des bâtiments (toitures, fenêtres, portes...) pour éviter que vent et débris ne s’engouffrent à l’intérieur et n’endommagent des produits et équipements.

Les plans d’urgence et de continuité des activités, qui constituent la deuxième catégorie de mesures de réduction des risques, incluent une liste d’actions qu’employés et responsables doivent entreprendre pour préparer leur site à faire face à un événement météorologique extrême. Il est par exemple essentiel que des collaborateurs soient personnellement chargés de vérifier l’enveloppe extérieure des bâtiments avant une tempête. De manière générale, chaque entreprise devrait rédiger un plan d’urgence clair, pour que tous les membres du personnel sachent exactement ce qu’ils ont à faire en situation de crise.

Pour les mêmes raisons, il est important de tester régulièrement le plan de continuité des activités. Dans un contexte de recherche permanente d’agilité, les entreprises se doivent d’y intégrer les changements affectant le personnel et les processus pour réagir efficacement avant, pendant et après un sinistre.

Le changement climatique, une problématique systémique

Au-delà des tempêtes et des inondations qui ont marqué l’été, il est probable que le changement climatique ait un impact sur d’autres risques. La montée des eaux et le réchauffement des océans pourraient ainsi, selon certains experts, augmenter la fréquence ou l’intensité d’autres phénomènes météorologiques extrêmes comme les ouragans et typhons.

Dans la mesure où de nombreuses entreprises sont implantées en zone côtière, la mise en place d’une stratégie de gestion des risques liés aux événements météorologiques extrêmes et inondations majeures devrait être une priorité dans les mois et les années à venir.

Quel que soit votre degré d’exposition, il n’est jamais trop tard pour commencer à vous préparer. Même si chaque site est exposé à des niveaux et types de risques différents, adopter une stratégie de gestion des risques basée sur les données et sur l’ingénierie n’en demeure pas moins fondamental pour faire face aux risques systémiques que le changement climatique amène dans son sillage.